Jean-Paul Gaillard

in revue Perspectives psychiatriques Vol. 42 n°2 avril-juin 2003.

Mots clés : schizophrénie - logiques de la communication - communication déviante - émotions exprimées - état de stress post-traumatique - apprentissages neuraux - apprentissages mentaux - émergence d'un monde - cognition - émotion - motivation - réapprentissage - thérapie systémico-cognitive.

Résumé : l'auteur propose de reprendre l'hypothèse qui décrit les comportements schizophréniques comme le fruit d'apprentissages long terme de règles interactionnelles familiales. Il propose en outre, concernant l'apparition des comportements schizophréniques, une hypothèse selon laquelle la tranche d'âge 18-24 ans constitue une période spécifique d'une catégorie de méta-apprentissages très particuliers recalibrant l'ensemble des apprentissages interactionnels du sujet, dont le candidat à la schizophrénie ne peut sortir indemne.

Key words : schizophrénia – logics of communication – communication deviance – exprimed emotions - posttraumatic disorder – neural training – mental training – emergence of a world – cognition – emotion – motivation – relearning – systémico-cognitive thérapy.

Sumary : the author proposes to retake the hypothesis of schizophrenia as a result of long family interactionnal learnings. He proposes moreover, on schizophrenic behaviour emergence, a hypothesis who the 18-24 years age is a period, specific for metalearnings who are recalibring all intractionnal learnings ; the candidate for schizophrenia can't here finish uninjured.

 

Introduction.

La schizophrénie reste aujourd’hui un défi majeur posé aux praticiens et aux chercheurs en psychopathologie de l’adolescence et du jeune âge adulte. Les praticiens, comme ils l’ont toujours fait, se débrouillent avec les moyens du bord, quel que soit le niveau de leurs connaissances : chimiothérapies dont la valeur reste désespérément palliative, internements dont peu s’accordent à leur donner une valeur réellement thérapeutique même si la plupart s’accordent à les considérer comme incontournables, psychothérapies diverses, dont aucune jusqu’alors ne montre une efficacité suffisamment constante.

Au delà des affirmations plus ou moins péremptoires quant à ses causes, exprimant plus des positions d’école que des hypothèses falsifiables (génome, neurotransmetteurs, forclusion du nom du père), et nous détournant résolument de l’observation des troubles chroniques qui, à nos yeux, offrent plus d’intérêt pour une recherche sur les interactions entre patients et institutions psychiatriques que sur les troubles schizophréniques eux-mêmes, nous nous proposons de focaliser sur les troubles naissants (Grivois 2001) à la fin de l’adolescence et sur les contextes dans lesquels il apparaissent.

Nous avons eu la chance (si l’on peut dire, en l’occurrence), au cours de notre déjà longue carrière de psychothérapeute de couple et de famille, d’être par deux fois le témoin d’une schizophrénie naissante, plus précisément d’être là plusieurs mois, voire une année, avant l’apparition du moindre trouble, les parents consultant pour une thérapie de couple.

Par deux fois, nous avons pu observer à loisir des jeux interactionnels récurrents tels que Bateson et Haley les avaient décrit il y a plus de cinquante années (Bateson et all. 1956) et tels que les nombreux travaux sur la communication deviance les ont scientifiquement validé (Hendrick 2002). Par deux fois, nous avons donc été en mesure d’observer, avant l’apparition de tout symptôme étiquetable comme relevant de la schizophrénie, des interactions de couple en direct, ainsi que des interactions familiales médiatisées par le récits des parents, qui confirment que ces modes interactionnels précèdent les troubles et n’en sont pas l’effet.

Nous nous proposons donc, dans la présente communication, de reprendre les travaux de Palo-Alto, en nous appuyant sur les nombreux travaux ultérieurs qui les valident. Leur total abandon par les psychiatres et psychologues institutionnels ne nous surprend pas, dans la mesure où, dans la quasi-totalité des cas, ils se passe une année entre le début des comportements schizophréniques et la première hospitalisation : ils ont donc très peu accès à la schizophrénie naissante. Son relatif abandon par les praticiens de la thérapie systémique ne nous surprend pas non plus, les grand courants développés au cours des vingt dernières années les ont orienté vers les formes les plus brèves de la thérapie, lesquelles semblent ne pas convenir à une prise en charge efficace des troubles schizophréniques (la récente évaluation à vingt ans de l’équipe de Mara Selvini-palazzoli à Milan donne 20 % d’effets positifs durables pour la thérapie de familles avec patient diagnostiqué schizophrène, alors qu’elle affiche 90 % avec l’anorexie mentale ; ces deux chiffres sont pratiquement les mêmes pour notre exercice évalué à quinze années).

Les modèles neurobiologiques.

Les résultats des travaux portant sur les taux de neurotransmetteurs (dopamine, sérotonine) mettent essentiellement en évidence des phénomènes concernant des schizophrène chroniques, dont peut-être des phénomènes liés à la chronicité ; en outre, ils signalent des différences d’ordre fonctionnel, telles que des apprentissages à dominante émotionnelle peuvent en produire. Nous n’avons pas connaissance d’études longitudinales portant sur les taux de sujets à risque non schizophènes, validées par ceux d’entre eux l’étant devenus par la suite (en revanche, de telles études, validées, existent sur les items communication deviance et exprimed emotion).

Quant à l’hypothèse « myéline », qui implique que la schizophrénie surviendrait sur un cerveau préalablement lésé à un moment où cette lésion empêcherait le processus de myélinisation des 16-24 ans, son très probable caractère explicatif ne couvre cependant qu’une faible partie de la cohorte des schizophrènes ; et la cohorte en cause, celle des prématurés, ne comporte qu’une faible proportion de schizophrènes : nous avons donc là un phénomène très probablement facilitant mais non déterminant. Nous verrons que les travaux des néo-piagetiens portant sur la classe d’âge incluant la période de myélinisation tardive peuvent offrir quelques éclairages sur cette question à partir d’autres hypothèses.

Toutes ces études, bien que très stimulantes et imposant peu à peu l’hypothèse selon laquelle les mêmes désordres schizophréniques pourraient survenir à partir de faisceaux causaux très différents[2], n’offrent cependant aujourd’hui encore, aucune piste thérapeutique praticable, si ce n’est celle, non négligeable, d’ajustements chimiothérapeutiques.

A l’évidence, il faut plus et autre chose que ce qu’elles mettent actuellement en évidence, pour produire un schizophrène.

Les modèles génétiques.

Nous n’irons, là-dessus, pas plus loin qu’Arnold Munich (Munich 2002), qui affirme qu’on ne trouvera jamais un gène de la schizophrénie : son autorité en matière de génétique nous semble suffisante. Quant à la si prometteuse anomalie du chromosome 5 (Bassett & Jones), elle a rapidement fait long feu. Que telle constellation génétique, ou tel problème chromosomique, puisse être impliquée dans les processus schizophréniques n’a évidemment rien d’impossible et semble même partiellement attesté, mais nous pensons que sur ces points les praticiens devraient s’inspirer de la prudence dont font actuellement preuve les chercheurs en génétique (Krebs 2003).

Les modèles pharmacologiques.

Les récentes ressentions d’Emmanuel Stip (Stip 2003) sont assez accablantes quant à l’indigence des recherches effectivement produites en psychopharmacologie clinique. Il ne mâche pas ses mots à l’encontre « des ardeurs des scientistes aveugles ». Il fait état d’une récente méta-analyse (Thornley & Adams 1998) montrant que nous sommes encore incapables de répondre sur le mode apodictique[3] à la simple question suivante : les neuroleptiques sont-ils efficaces pour traiter la schizophrénie ?

Nous avons une conscience trop aiguë des transformations positives directement entraînées par l’usage des neuroleptiques dans les hôpitaux psychiatriques au début des années soixante, pour tirer sur le pianiste, même s’il joue faux ; nous remarquons simplement que l’option que nous tentons ici de promouvoir est loin d’arriver sur un terrain puissamment balisé par des modèles bio-pharmaco-génétiques forts. Leur actuelle faiblesse laisse une place suffisante à des recherches et hypothèses d’autre nature et, même, les encourage.

La schizophrénie comme effet d’un apprentissage logico-émotionnel.

Les travaux de Bateson et Haley ont mis en évidence des jeux interactionnels précis et identifiables, qu’ils estimaient spécifiques des familles à transactions schizophréniques. Ils ont immortalisé ces jeux à travers le concept de double bind, généralement traduit par double contrainte. Nous en proposons un rappel dans un prochain paragraphe. Il est intéressant de remarquer que, depuis une trentaine d’années, de nombreux chercheurs américains (Hendrick 2002) ont très largement validé cette assertion à travers le concept de communication deviance (CD) et celui d'exprimed emotion (EE), qui leur ont permis de quantifier et de qualifier avec précision divers niveaux et divers degrés de distorsion dans les interactions familiales des familles comprenant un patient schizophrène. Le fait que ces travaux soient quasiment inconnus en France n'enlève rien à leur valeur. Le fait, parallèlement, que les hypothèses bio-pharmaco-génétiques tiennent actuellement le haut du pavé n’apporte, nous l’avons vu, rien à leur valeur.

Aussi surprenant qu’il y puisse paraître en notre époque, l’hypothèse de la schizophrénie comme effet d’un apprentissage logico-émotionnel particulier se révèle être une hypothèse forte, la plus forte, probablement, dont nous disposions actuellement, les hypothèses bio-pharmaco-génétiques (et psychanalytiques) ne disposant à l’heure actuelle d’aucun début de validation comparable. 

Ce que nous enseignent les états de stress post traumatiques (ESPT).

Une mise en perspective entre notre propre expérience de débriefeur, et les divers travaux cliniques portant sur la description des symptômes développés par les victimes d’expériences traumatiques, nous a conduit à proposer un modèle décrivant les processus mis en jeu par un choc à valeur traumatique (Gaillard 2003). Ce modèle intègre les trois organisations composantes de l’esprit : cognitionnelle, émotionnelle et motivationnelle, telles que LeDoux, par exemple, les implique dans ses travaux (LeDoux 2002).

Ces trois organisations, ou sous-systèmes, offrent l’avantage de se montrer descriptibles, tant sur le plan anatomique, que sur les plans fonctionnels, neuropsychologique et mental. De même leurs couplages sont empiriquement descriptibles, tant dans leur constance générale que dans leurs diversités particulières et prêtent facilement à expérimentation (animale).

Nous avons résumé en trois points, couvrant les trois sous-systèmes, les conditions de production d’un état de stress aigu (ESA) puis, à terme, d’un état de stress port-traumatique (ESPT) :

  • Production d’un blanc cognitif (cog.) : l’événement n’est pas identifiable et encore moins catégorisable par le sujet. Son appareil perceptif est « planté » tout comme peut l’être un ordinateur ayant reçu une commande incompatible avec son organisation ;
  • Production d’un pic émotionnel (emot.) : le sujet est envahi par une vague émotionnelle d’une intensité extrême, dans la plupart des cas (sinon dans la totalité) supérieure à ce qu’il a jamais éprouvé ;
  • Production d’une stase motivationnelle (mot.) : le sujet est cloué sur place, dans l’impossibilité d’agir.

Nous pensons pouvoir affirmer que, hors de ces trois conditions, il n'y a pas d'état de stress aigu et que, à l'inverse, quand ces trois conditions sont réunies et quelle qu'en soit la cause, il y a production d'un état de stress aigu avec fort danger d’ESPT.

Mémoire traumatique.

L’effet majeur de cette expérience est bien connu des praticiens : il consiste en la production d’une forme très particulière de mémoire. En effet, les objets (percepts) susceptibles de devenir objets de mémoire y subissent un traitement particulier.

Là où les objets-mémoire courants subissent un traitement qui conduit à leur oubli relatif (ils peuvent se reconstruire en objets-souvenir sous la pression de perturbations internes ou externes), les objets-trauma restent d’un éternel présent ; ils sont littéralement inoubliables. La violence de l’expérience émotionnelle semble produire un apprentissage neural très stable, non régulable par le couplage dynamique habituel entre les trois organisations (cog., emot., mot.) et qui à l’évidence détermine progressivement et implacablement un fonctionnement mental cognitif et motivationnel assez spécifique pour être décrit en termes de syndrome (état de stress port-traumatique) ; notre hypothèse, à ce propos, est que ce débordement des fourchettes d’auto-contrôle dans l’organisation neurale émotionnelle produit un type d’apprentissage tel, qu’elle prend le contrôle des organisations mentales cognitives et motivationnelles, ou les shunte, avec les dégâts mentaux, interactionnels et sociaux que l’on sait.

Ce type d’apprentissage neural est aujourd’hui concevable : en effet, les travaux de Yagi (Yagi 1999) sur un processus de mutation somatique neurale comparable à celui déjà décrit comme produisant la mémoire spécifique du système immunitaire, autorise l’hypothèse selon laquelle un réseau neuronal pourrait, dans certaines conditions de pression, produire une mémoire très stable qui ne relèverait plus du processus, mais de l’état. Cette hypothèse, soulignons-le, est par ailleurs soutenue par l’observation clinique des patients ESPT. Yagi a montré qu’un grand nombre de récepteurs synaptiques se comportaient de la même manière que les anticorps lorsqu’ils mémorisent la forme d’une nouvelle molécule : ils sont en effet le siège de mutations somatiques identiques à celles déjà observées dans le système immunitaire. La mémoire synaptique témoignerait donc non seulement d’une grande plasticité (déjà reconnue), mais procéderait d’une incessante combinatoire entre du « stable » et du « mutant ».

Cette capacité de mutation somatique des neurones, c'est-à-dire leur capacité de conserver longtemps, voire indéfiniment, la mémoire d’un état particulier, a très justement permis à Yagi de parler d’un nouveau paradigme de la mémoire neurale.

Nous pensons que la psychopathologie peut à la fois profiter de ce modèle et le complexifier utilement à l’aide du modèle autopoïétique (Varela 1989, Gaillard 1998).

Mémoire schizophrénique.

Notre hypothèse est que ce que vit un candidat à la schizophrénie durant toute son enfance et son adolescence peut se modéliser sur les processus en cause dans l’ESA et l’ESPT, à partir d’un homomorphisme que nous pensons suffisamment consistant entre les particularités émotionnelles, cognitionnelles et motivationnelles qu’on observe dans les deux cas.

La seule différence notable est le caractère redondant de l’événement : là où un seul événement suffit à produire un Etat de Stress Aigu suivi d’un Etat de Stress Post-Traumatique, une suite indéfinie de petits événements de même structure produit un apprentissage communicationnel schizophrénique.

Mais dans les deux cas, l’organisation émotionnelle prend le contrôle de l’organisation cognitive et motivationnelle, dans les deux cas, on observe des blancs cognitifs et une stase motivationnelle et dans les deux cas, le fonctionnement humain général récemment décrit par l’équipe INSERM EP17 (Pochon, Léwy, Dubois 2002), n’est pas respecté : ils ont en effet montré que, au cours de tâches mentales (problèmes logiques) qui réclament un effort de concentration, l’organisation neurale émotionnelle et l’organisation neurale cognitionnelle se déconnectent l’une de l’autre. A l’évidence, dans les cas de l’ESPT et de la schizophrénie, les tâches cognitionnelles complexes ne se libèrent pas de la sphère émotionnelle et se montrent au contraire très affectées par cette dernière.

Un modèle pour l’apprentissage neural.

Joseph LeDoux, professeur de neurobiologie à l’université de new-york  (LeDoux 2002), nous offre un d’appui vers une tentative de modélisation de certains troubles mentaux, en particulier de l’ESPT et de la schizophrénie.

Le modèle proposé par LeDoux est simple et reflète avec clarté les positions les plus actuelles de la neurobiologie officielle ; il intègre trois niveaux d’effectuation neurale de l’esprit : cognitionnel, émotionnel et motivationnel qui sont, nous l’avons signalé, aisément repérables tant sur le plan anatomo-physiologique que sur le plan fonctionnel et ce, tant au niveau neural que mental.

Il est aujourd’hui admis que ces trois niveaux se répartissent et se combinent sur la totalité du Système Nerveux Central (SNC), du Système Nerveux Périphérique (SNP), du Système Neuro Endocrinien (SNE) et du Système Immunitaire (SI), dont il apparaît qu’ils sont richement interconnectés et fonctionnellement redondants.

LeDoux propose un modèle de l’apprentissage neural selon lequel l’activité en parallèle de ces trois niveaux ne communiquant pas directement entre eux, serait mise en cohérence par le fait qu’ils font l’expérience du même monde. Les activités neurales sensorielles, cognitionnelles, émotionnelles et motivationnelles, liées par l’expérience d’un même objet, se synchroniseraient[4], passant à un niveau supérieur d’effectuation : l’esprit.

L’ensemble des mécanismes décrits dépendrait du travail de mémorisation des connexions synaptiques.

Remarquons que l’assertion selon laquelle ces trois organisations ne communiquent pas directement entre elles, intègre le processus de clôture opérationnelle, tel que décrit par Varela (Varela 1989) et selon lequel chaque organisation composante d’un organisme complexe est opérationnellement close sur elle-même et produit son information. C’est la stabilité des couplages entre elles au sein d’un organisme, stabilité entraînant des coordinations d’actions elles-mêmes stables et co-productrices de processus émergents de complexité supérieure (Maturana & Varela 1994, Atlan 2000), qui conduit les observateurs à croire à une inter-information entre ces parties composantes. Ici, LeDoux postule que, de par le fait que l’ensemble des organisations composantes d’un sujet prennent connaissance de la même expérience (the same imputs), elles prennent connaissance d'un seul et même monde.

l’expérience du même monde.

Maturana et Varela (1974-1989-1994), Luhmann (1995) et Atlan (1970-2000), attirent notre attention sur ceci qu’une organisation (biologique, fonctionnelle), bien qu’étant une partie composante d’un organisme alors défini comme système, fonctionne sur un mode autoréférentiel auto-organisé. Cela implique que chaque organisation composante d’un organisme :

  • produit son identité comme effet de sa clôture,
  • produit son information à partir de ses caractéristiques propres (elle ne la recueille pas)
  • définit les organisations connexes comme son environnement (Varela 1989, Luhmann 1995) et les utilise comme tel, à la condition que le bruit produit par l’activité de ces organisations connexes soit compatible avec l’équipement cognitif[5] de cette organisation.

Or, chacun des niveaux décrits par LeDoux répond à la définition d’une organisation (ou sous-système) en ce qu’il peuvent se décrire comme unités fonctionnelles auto-définies dans des frontières, à partir de composants organiques et fonctionnels particuliers et possédant des modalités (règles) de fonctionnement propres.

De fait, LeDoux décrit un modèle de brain system, au sein duquel chacune des organisations serait close et fonctionnerait selon des modalités qui lui sont particulières (vue, ouie, odorat, par exemple). Il renonce cependant à retenir les conséquences logiques de la clôture, qui voudraient que chacune d’entre elles construise une expérience différente de celle des autres : « Normally, this condition does not occur. The various systems of our brain share the same experiences. » (LeDoux 2002).

Nous ne le suivrons pas dans ce retrait, dans la mesure où la caractéristique de clôture opérationnelle du vivant (Varela 1989) nous semble avoir des effets suffisamment spécifiques et significatifs sur les fonctionnements du vivants pour qu’il soit impossible de la tenir a priori pour négligeable.

Certes, la puissance du couplage qui lie les organisations ici en question (cognition, émotion, motivation), tant du point de vue de l‘évolution (quelques millions d’années) que de celui de l’ontogenèse, implique de facto que, dans la moyenne des cas, on puisse considérer qu’elles expérimentent un même monde. Non pas que cette assertion soit correcte, mais elle constitue une approximation suffisante pour décrire la production d’un humain normal.

S’agissant des troubles mentaux, nous proposons de ne pas nous satisfaire de cette approximation et de considérer qu’effectivement chacune des organisations co-productrices de l’esprit selon LeDoux, est opérationnellement close et produit ses univers de significations sur un mode autoréférentiel.

Nous considérerons donc que la coordination effectivement observable entre elles (Singer 2002) ne s’opère favorablement que dans les cas où aucune discordance significative, aucun déséquilibre récurrent, n’intervient entre la production des mondes cognitionnel, émotionnel et motivationnel, ou, plus simplement même, entre la production des mondes visuel et auditif. Nous verrons que, précisément, cette discordance est caractéristique des modes interactionnels schizophréniques.

Logiques neurales et logiques mentales.

Nous n’avons pas une vue naïve des liens qui peuvent exister entre logiques neurales et logiques mentales. Le système neural est un invariant biologique (l’organisationnel selon Varela 1989), le système mental est le jeu des variables bio-étho-socio-culturo…logiques (le structurel selon Varela 1989) qui, à partir du même invariant depuis 50.000 ans, ne cesse de produire du nouveau.

Le processus « esprit » se propose donc comme un système émergent à partir des jeux de couplages complexes entre les organisations composantes neurale et les structures neurales et extra-neurales d’un sujet l’humain dans ses contextes ; cela ne doit pas nous conduite à un glissement logique assimilant l’un à l’autre. L’univers mental semble répondre autant que l’univers neural aux règles fonctionnelles de tout système vivant : clôture, autoréférence, auto-organisation, règles propres. Entre les mondes neuraux (biologiques, électrochimiques, ioniques, etc.) et les mondes mentaux (images, langages, rituels interactionnels, etc.) existe une frontière logique inexpugnable qui n’est transgressée que dans des conditions très particulières de débordement des auto-contrôles d’une ou plusieurs de leurs parties composantes. Ainsi, par exemple en est-il d’un événement à valeur psychotraumatique provoquant un état de stress aigu, puis un état de stress post traumatique.

Hors de ces types très particuliers d’événements producteurs de couplages invasifs, les mondes neuraux et les mondes mentaux connaissent des niveaux de couplages co-pénétrants assez respectueux des frontières communes pour que les mouvements internes des mondes neuraux et ceux des mondes mentaux ne s’interperturbent guère au delà de ce que les niveaux d’accordage génétiquement déterminés autorisent. Il faut remarquer que l’efficacité de la clôture est telle que des millions de neurones peuvent mourir chaque jour sans nuire le moins du monde au fonctionnement mental, que certaines altérations anatomiques du SNC, parfois spectaculaires (absence de la moitié d’un lobe), n’entravent pas du tout les fonctionnements de la sphère mentale, et que des interventions neurochirurgicales majeures telles qu’une hémisphère-ectomie voient les adolescents opérés récupérer des fonctionnalités mentales non négligeables (Ptito, Fortin, Ptito 2002).

Une période féconde, pour un apprentissage particulier.

Notre hypothèse, pour la production d’une schizophrénie, est donc celle d’un apprentissage logico-cognitif particulier, fondé sur la constance d’une distorsion communicationnelle telle qu’elle impose aux différentes parties composantes du cerveau et de l’esprit la production de mondes incoordonnables.

Une question, cependant, reste posée : pour quelles raisons les symptômes de la schizophrénie n’apparaissent-ils avec une remarquable régularité qu’entre 16 et 24 ans ? Que peut-il se passer dans la vie d’un humain, entre 16 et 24 ans, qui fasse que cette période soit si constamment et si universellement féconde pour la « psychose naissante » (Grivois 2001) ?

Concomitamment au processus final de myélinisation qui se produit dans cette tranche d’âge[6], cette période est la période sensible d’un méta-apprentissage inévitable chez l’humain que seul les néo-piagétiens, peu enseignés en France, ont abordé. Nous retiendrons les travaux de Kurt Fisher avec ses structures de skills, ou structures d’habiletés de résolutions de problèmes du sujet dans un contexte (Fisher 1980) qui intègrent la période qui nous intéresse, celle à laquelle apparaissent les comportements schizophréniques, entre 16 ans et le jeune âge adulte.

Le modèle de Fisher comprend trois niveaux et 10 sous-niveaux.

Son troisième niveau, celui de l’abstraction, s’étend sur trois sous-niveaux, de 16 ans au jeune adulte :

  • sous-niveau 8 : appariements abstraits,
  • sous-niveau 9 : systèmes abstraits,
  • sous-niveau 10 : systèmes de systèmes abstraits.

Les thérapeutes systémiciens se sentent ici en terrain connu : il suffit en effet de relire cet article magistral écrit à quatre mains en 1956, qu’est « vers une théorie de la schizophrénie ». Bateson, Haley, Weakland et Don jackson (1973) y résument à la fois les éléments d’une théorie de la communication, toujours valide et sur laquelle, aujourd’hui encore, les thérapeutes systémiciens fondent étroitement leurs pratiques, et les éléments pour une théorie de la schizophrénie.

Logiques de la communication.

Ce qu’il est convenu d’appeler génériquement l’école de Palo Alto, a donc proposé un modèle général de la communication humaine, dont nous rappellerons ici les points saillants. Bateson et ses collaborateurs distinguent cinq processus généraux, cinq parties composantes de ce qu’on appelle communication :

  • La ponctuation interniveaux. Les humains combinent en permanence trois modes de communication : digital, analogique et contextuel. Les mêmes mots, selon qu’ils sont associés à telle mimique, telle gestuelle, tel contexte, engageront des significations extrêmement différentes. Les mêmes mimiques, les mêmes gestuelles, selon qu’elles sont associées à tel ou tel mot dans tel ou tel contexte, engageront des significations extrêmement différentes. Les différents niveaux se ponctuent mutuellement et c’est de cette ponctuation qu’émergent des significations entre les interlocuteurs.
  • L’humour. Il émerge d’un usage particulier dans la combinaison de différents niveaux logiques de la communication. « le moment explosif de l’humour est celui où la classification d’une modalité de communication subit une dissolution et une re-synthèse ». Dans l’exemple suivant, tiré d’un recueil d’humour anglo-saxon : « à la mort de son troisième mari, ses cheveux, de chagrin, sont devenu blonds», il apparaît de fait clairement que la classification d’une modalité de communication (ici fondée sur la malchance et le chagrin) subit une dissolution, suivie d’une re-synthèse à un autre niveau (nous attendons des cheveux blancs, ils sont blonds, ce qui signifie : « à moi la grande vie avec mon troisième héritage ! »)[7].
  • La falsification des signaux d’identification des modes de communication. Ce sont d’une part les modes culturellement établis de falsification : les rituels de politesse, par exemple, et d’autre part les stratégies individuelles ou collectives (conscientes et inconscientes) de manipulation de la relation.
  • L’apprentissage. Les comportements, les attitudes, les manières de raisonner, de ressentir, de communiquer émergent d’apprentissages familiaux, culturels et sociaux, c'est à dire d’expériences suffisamment répétitives pour devenir des habitudes (coordinations d’actions dans la terminologie autopoïétique). Bateson définit 4 niveaux dans les catégories de l’apprentissage :
  • Apprentissage de niveau 0, qui implique un lien rigide entre le signal et la réponse.
  • Apprentissage de niveau 1, au cours duquel le lien entre signal et réponse se modifie progressivement.
  • Apprentissage de niveau 2, apprentissage sur les structures d’un apprentissage (appr. catégorisationnel, deutéro-apprentissage).
  • Apprentissage de niveau 3, qui consiste en la production d'informations sur les contextes des structures de l'apprentissage (recadrages, renversements paradigmatiques).
  • Les niveaux multiples d’apprentissage et la classification logique des signaux. Ce sont deux phénomènes inséparables l’un de l’autre. La capacité à manier et à classer des types et des niveaux multiples de signaux relève, selon Bateson, d’un apprentissage qui « définit précisément le processus de distinction des modes de communication, à l’intérieur de soi, comme entre soi et les autres. ». Ce cinquième registre nous semble largement correspondre aux étages 8, 9 et 10 des structures de skills.

A considérer ces cinq registres, il apparaît que les auteurs définissent la communication humaine comme le lieu permanent de jeux mimiques, gestuels et symboliques paradoxaux. Les linguistes, les sémanticiens et les philologues contemporains ne démentent pas ceci que, effectivement, le paradoxe est au cœur de la richesse sémantique du langage humain.

Il convient d’y ajouter les grands repères logiques qui balisent la cognition humaine depuis des millénaires :

  • le principe d'abstraction (ou principe de compréhension) qui s’énonce comme suit : à toute propriété, prédicat ou caractéristique, correspond nécessairement un ensemble d'objets, y compris si cet ensemble est vide.
  • le principe de non contradiction : un cercle ne peut être carré.
  • le principe du tiers exclu : X doit être blanc ou noir, c’est oui ou c’est non.

Définition de la relation.

Jay Haley, compagnon de la première heure de Bateson, insiste sur une procédure interactionnelle universelle, qu’il nomme « définition de la relation » (Haley 1993). Tout humain s’adressant à un autre humain ne peut le faire qu’à travers quatre items : je / dis quelque chose / à vous / ici et maintenant. Ce que Haley appelle « définition de la relation » est la structure émergente de l’inévitable positionnement circulaire des interlocuteurs à travers ces quatre items.

Haley, posant cinq questions (sur la qualification par les membres de la famille de leurs propres communications / sur la qualification des communications des autres / sur le leadership / sur la question des alliances / sur la question des responsabilités et du blâme), remarque que les membres des familles à transactions schizophréniques, systématiquement entre eux, ne qualifient pas leurs propres communications ni celles des autres, qu’ils cherchent le leadership sans jamais l’assumer ouvertement, ne définissent pas leurs alliances et rejettent responsabilité et blâme sur l’extérieur. Cette configuration particulière dans le processus général « définition de la relation » ne se retrouve pas dans les familles au sein desquelles n’émerge aucune pathologie et, plus intéressant encore, d’autres configurations semblent spécifiques d’autres troubles : c’est le cas des familles à transactions anorectiques (Selvini-Palazzoli 1993, Gaillard 1998) et ce pourrait aussi être le cas des familles à transactions bipolaires (Miklowitz e coll. 1994).

Communication, apprentissages communicationnels et schizophrénie.

Observant les modes de communications des schizophrènes déclarés, Bateson, Haley et Weakland remarquent qu’ils semblent montrer des difficultés dans cette dernière fonction communicationnelle, à trois niveaux :

  • difficulté à attribuer le bon mode de communication aux messages qu’ils reçoivent des autres ;
  • difficulté à attribuer le bon mode de communication aux messages verbaux et non verbaux qu’ils émettent eux-mêmes ;
  • difficulté à attribuer le bon mode de communication à leurs propres pensées, sensations, perceptions.

Deux remarques sont ici possibles : il devient superflu de recourir à l’hypothèse précédentielle classique d’une expérience traumatique spécifique dans l’enfance ; il devient en revanche utile d’explorer le registre des apprentissages communicationnels tous niveaux (neural, sensori-moteur, procédural, émotionnel, langagier, symbolique), de l’enfance à l’âge adulte. C’est ici que Kurt Fisher et ses structures de Skills rejoignent l’observation batesonienne et nos préoccupations.

L’observation de Yagi, des processus d’apprentissages et de mémorisation neuraux par mutations somatiques en grand nombre recombinant certains réseaux de neurones, appuyé par les observations cliniques récurrentes des processus en jeu dans la production d’ESPT, permet d’inférer que des interactions très redondantes produites dans un milieu suffisamment clos et dans une tonalité émotionnelle élevée puissent à la longue se traduire par des câblages neuraux très stables, combinant un jeu de mémorisation émotionnelle, cognitionnelle et motivationnelle, dont la particularité serait une non-synchronisation. Bateson, avec l’acuité qui le caractérise, décrit à ce propos : « un univers où les séquences d’événements sont telles que des habitudes non conventionnelles de communication y sont, dans une certaine mesure, appropriées. » (Bateson 1956).

Le double bind.

Il nous faut donc répondre à la question suivante : qu’est-ce qui, précisément, différencie cet apprentissage schizophrénique des autres apprentissages communicationnels, sachant que le paradoxe est au cœur des logiques communicationnelles normales ?

La formalisation des logiques de la communication associée à l’observation des particularités visibles dans la communication schizophrénique, ont conduit Bateson et ses collègues à observer plus finement les communications au sein des familles comprenant un schizophrène. Ajoutons que tout praticien travaillant avec des familles dites à transactions schizophréniques peut facilement observer in vivo ce que Bateson décrit.

Nous savons que pour distinguer entre les modes de communication, les humains s’appuient sur une permanente évaluation du jeu digital / analogique / contextes, et que, pour cela, ils stabilisent certains jeux interactionnels, en particulier la définition de la relation. C’est donc à ce niveaux, celui des habitudes mentales acquises dans la communication, que nous pouvons focaliser notre observation.

Bateson et ses collaborateurs ont pu isoler une séquence communicationnelle redondante qu’ils ont hypothisée comme spécifique des familles comportant un schizophrène, séquence connue sous le nom de double bind. Elle se décrit comme suit :

  1. deux personnes ou plus, en général les membres d’une famille ;
  2. une expérience répétée au quotidien dans une ambiance émotionnelle toujours montante ;
  3. une injonction négative primaire du type : « ne fais pas ceci ou je te punirai» ou « si tu ne fais pas ceci je te punirai» ;
  4. une injonction secondaire qui contredit la première à un niveau plus abstrait, tout en étant, comme elle, renforcée par des signaux menaçants. Cette injonction secondaire est plus difficile à décrire que la primaire, parce qu’elle est en général de mode analogique c'est à dire non verbal. Par exemple, on associera à « ne fais pas ceci ou je te punirai», un message analogique indiquant « mais tu dois le faire quand même, sinon… » ou encore « ce que je viens de dire n’a aucune importance…».
  5. Une injonction négative tertiaire en forme de « basse continue», contexte implicite à toute communication intrafamiliale, qui interdit aux membres de la famille d’échapper à la situation, de type : « impossible d’exister en dehors de la famille» ou encore : « le monde extérieur est si dangereux que ton seul salut est la famille ».
  6. La violence émotionnelle dans l’interaction, associée à la forme contradictoire des message, empêche le processus régulateur de méta-communication (production d’information complémentaire).
  7. L’observation montre qu’une fois l’apprentissage acquis, l’ensemble des séquences n’est plus nécessaire pour que le double bind fonctionne : tout paradoxe communicationnel normal, puisqu’il ne peut éviter de se combiner avec l’injonction négative tertiaire (hors de la famille, point de salut), prend une valeur double bind ; dans le comportement schizophrénique chronique, le double bind  devient donc le contexte implicite de toute communication, et les injonctions négatives secondaire et tertiaire sont même souvent véhiculées par des hallucinations auditives.

Il est facile de remarquer ici, que les trois principes logiques fondamentaux : abstraction, non contradiction et tiers exclu, qui furent les seules balises logiques de la science jusqu’à l’avènement du paradigme de la complexité et qui restent de nos jours des balises communes fondamentales dans l’organisation de la cognition et de l’action commune, ne trouvent pas leur usage dans le style communicationnel double bind.

les travaux sur la déviation dans la communication (CD).

A la suite des travaux fondateurs de l’équipe de Palo Alto, des chercheurs américains s’emploient depuis quarante ans à valider scientifiquement ces problèmes de communication à travers le concept de « communication déviance » (CD). Cette approche, bien qu’appauvrissant les processus en cause, nous semble être d’un intérêt fondamental, en ce qu’elle confirme magistralement les observations de l’équipe de Bateson.

Ainsi, Singer et Wynne, étudiant la CD depuis plus de vingt années (Hendrick 2002), proposent en 1986 une grille d’observation en six registres, dans le but d’observer plus finement les interactions familiales :

  1. rupture de cadre
  2. désengagement par rapport à la tâche
  3. perturbations de la coréférence
  4. perturbations du langage
  5. perturbations du raisonnement
  6. énoncés cryptiques

Ils parviennent ainsi à prédire correctement en aveugle (à 8O% versus 41% au hasard) le diagnostic de la progéniture à partir des réponses parentales à cette épreuve CD. Ils mettent en évidence que le score CD parental prédit mieux le trouble que le score du patient, bien que le score des patients schizophrènes reste supérieur à celui des non-schizophrènes.

Le score CD des frères et sœurs bien portants sont plus élevés que ceux de fratries comprenant d’autres pathologies, impliquant encore plus clairement l’hypothèse d’un style particulier de communication familiale (Singer Wynne et Toohey 1978).

Miklowitz (1994) met en évidence que les parents avec un score CD élevé montrent aussi un score d’émotions exprimées (EE) élevé, score évalué autour des items suivants :

  • surinvestissement émotionnel,
  • combinaison de comportements critiques à l’égard du patient.

Goldstein (1992) met en évidence que dans un groupe de familles à risque, les parents à score CD élevés se montrent plus susceptibles que les autres de :

  • éviter d’échanger des sentiments
  • éviter le contact du regard
  • manifester des expressions faciales rigides et figées

Il remarque en outre que les CD maternelles sont significativement plus élevées dans les familles où l’alliance conjugale est faible et dans les familles où l’index de dysfonctionnement est élevé.

Une étude (Rund et coll. 1995) portant sur l’évaluation CD et EE de patients et leurs familles avant et après une thérapie psycho-éducative de deux années, montre que dans la plupart des cas les familles ont abaissé leur taux de EE et les patients ont amélioré leur taux de jugement (global assessment). C’est le taux de CD qui a le plus résisté au traitement proposé.

Double bind, communication déviance : leurs effets.

Quels sont, précisément, les effets de tout cela, en terme de cognition, d’émotion et de motivation ?

  1. cognition: dès sa prime enfance, le sujet se trouve au quotidien dans la situation d’avoir à résoudre des problèmes de logique communicationnelle pour lesquels il n’est pas équipé : Il s’installe peu à peu dans un état de perplexité cognitive (dissonance accumulée) ;
  2. motivation: perplexité cognitive qui le met dans une stase motivationnelle, dont la catatonie des schizophrènes chroniques est le culmen ;
  3. émotion: stase dont il n’est possible de sortir qu’en boostant l’émotionnel. Bateson décrit ce temps en termes darwiniens d’enjeu vital pour l’enfant.

Au final, cela donne des comportements un peu bizarres (silences inattendus, métaphores non étiquetée, comportements d’échappement, humour déjanté), inadéquats du point de vue des interlocuteurs familiaux, et qui constitueront des boucles de renforcement de ce système communicationnel particulier.

Ils ne seront interprétés comme fous que par les observateurs extérieurs, ou par la famille pour des observateurs extérieurs.

Si nous comparons cette trajectoire avec celle que nous pouvons décrire chez nos patients en état de stress post-traumatique, nous retrouvons les mêmes items aux mêmes places. Nous avons vu que ce qui détermine un état de stress aigu, puis un état de stress post-traumatique peut se décliner en trois points :

  • un pic émotionnel : le sujet est envahi par une vague émotionnelle d’une intensité extrême ;
  • un blanc cognitif : l’événement n’est pas identifiable et encore moins catégorisable par le sujet ;
  • une stase motivationnelle : le sujet est cloué sur place.

Notre hypothèse, donc, est que ce que vit un candidat à la schizophrénie au quotidien durant toute son enfance et son adolescence peut se modéliser sur les processus en cause dans l’ESA, à partir d’un homomorphisme que nous pensons suffisamment consistant entre les particularités émotionnelles, cognitionnelles et motivationnelles qu’on observe dans les deux cas.

La seule différence notable, nous l’avons souligné, est le caractère redondant de l’événement : là où un seul événement suffit à produire un ESA, une suite indéfinie de petits événements de même structure produit un apprentissage communicationnel schizophrénique. Ce que nous connaissons des états de stress chronique (ESC) dont sont victimes un grand nombre de professionnels de l’urgence (pompiers, gendarmes, policiers, personnels hospitaliers), état au final très semblable à l’ESPT bien que moins bruyant, nous autorise à passer outre cette différence.

Des mondes non compatibles.

Le réducteur de complexité proposé par LeDoux avec son postulat d’une expérience faite du même monde par les diverses organisations cognitives, ne peut pas être soutenu dans le cas des transactions schizophréniques et de leurs effets, pour les raisons suivantes :

  • Au sein de l’organisation cognitive d’un candidat à la schizophrénie, les sous-ensembles visuel et auditif pour n'évoquer qu'eux, ne font pas l’expérience du même monde, mais de deux mondes perpétuellement incommensurables. Une question permanente est : « ai-je bien vu ce que j’ai vu, étant donné que ce que j’ai entendu l’infirme et réciproquement ?»
  • Cette dissonance insoluble génère une stase motivationnelle: « que faire pour sortir de cette situation ? Mais penser et agir selon ma vue, c’est penser et agir contre mon audition ! Bouger de quelque façon que ce soit, c'est avoir tort !»
  • Le tout dans une ambiance émotionnelle en permanence à la hausse : « vite, trouver quelque chose, mais il n’y a que des murs contre lesquels se cogner ou du danger à affronter dehors ! Pas de réponse possible, pas de fuite possible…»

Nous avons là un apprentissage communicationnel qui exclut la coordination postulée par LeDoux : les percepts visuels et auditifs sont irréductibles l’un à l’autre, les logiques communes (abstraction, non contradiction, tiers exclu) n’y offrent aucun repère, et l’intensité émotionnelle en permanence au delà des limites, fixe neurologiquement cette dissonance.

Tant que tout se passe en famille et que le candidat n’est pas encore confronté à la période sensible du troisième niveau des structures de skills, les acteurs médico-psycho-sociaux ne sont jamais convoqués à entrer dans le jeu : l’injonction de fond est bien intégrée par l’adolescent (pas de salut hors de la famille), de sorte qu’il reste suffisamment à l’écart des autres pour ne pas attirer l’attention autrement qu’à travers des remarques de ses professeurs telles que : « adolescent sérieux, un peu solitaire, un peu taciturne ». Les quelques comportements inusités (Selvini-Palazoli 1993) que la plupart des adolescents concernés montrent de temps à autre, génèrent en général chez les témoins extra-familiaux un blanc cognitionnel associé à une stase motivationnelles, suffisants pour qu’aucune alerte ne soit donnée : dans notre expérience, les témoins en question n’osent en parler aux parents  qu’après que les troubles soient déclarés et connus.

Fisher attire notre attention sur ceci que la période sensible 16-24 ans implique un réajustement méta-catégorisationnel considérable, ce que les thérapeutes perçoivent habituellement en termes de remaniements identitaires profonds. Ce réajustement passe par une inévitable mise en perspective des modes communicationnels familiaux avec les modes communicationnels communs ; il nous semble qu’une « psychose naissante » (Grivois 2001) ne soit que l’expression d’un échec dans cette mise en perspective entre des logiques communicationnelles familiales qui ont fait l’objet d’un apprentissage de très faible plasticité (niveau zéro de Bateson) que nous qualifierons de neuropsychologique, et les logiques communicationnelles communes.

Quelles différences, si importantes qu’elles puissent générer de tels troubles ?

Si nous reprenons les cinq composants des logiques communes de la communication, telles que Bateson et ses collaborateurs les définissent, il est facile d’inférer que pour que cet ensemble communicationnel fonctionne favorablement, il nécessite à la fois un espace de diversité dans les éléments communicationnels (proxémique, exposition de sentiments et d’opinions) et à la fois un jeu de définition de la relation tel qu’il définisse suffisamment chacun des acteurs familiaux en tant que sujet de ses actes et de ses pensées.

Or, les thérapeutes systémiciens et les chercheurs américains sur la communication deviance observent très régulièrement, confirmant la description de Bateson et Haley, que le processus de définition de la relation connaît dans ces familles de graves distorsions ; de même, les logiques communicationnelles engagées dans ces familles sont très redondantes, c'est-à-dire pauvres de la diversité nécessaire au déploiement commun de jeux communicationnels suffisamment complexes.

Le modèle autopoïétique nous permet de décrire les séquences interactionnelles en termes de coordinations d'actions comme matrices de tout apprentissage, sensori-moteur (procédural), intellectuel (cognitif) et émotionnel (Maturana, Varela 1994). Dans une famille à transactions schizophréniques, les coordinations d'actions stabilisées comme mode récurrent de communication semblent se montrer incompatibles avec les logiques communicationnelles communes, en même temps que très peu susceptibles de modifications par apprentissage (niveau zéro selon Bateson) au moment où cela devient indispensable (16-24 ans).

Les remarques de Grivois (2001) prennent ici toute leur importance : il souligne en effet que, de son point de vue, le problème de la schizophrénie n’est pas tant un problème de fantasmes et autres productions intrapsychiques, qu’un problème de relations, de gestes, d'« événements sensori-moteurs » (Grivois 2002) ; ces remarques rejoignent celles de Haley, fondatrices des bases théorico-pragmatiques les plus consistantes concernant les comportements schizophréniques : Haley souligne en effet que lorsque la question de la définition de relation devient omniprésente au sein d’un groupe, le contenu des message perd totalement son importance jusqu’à n’être qu’un instrument servant à prendre le contrôle de la relation. Ce sont donc bien des événements sensori-moteurs qui prennent toute la place dans les jeux communicationnels des familles à transactions schizophréniques.

Grivois remarque en outre que ce qui caractérise l’attitude schizophrénique, dès lors qu’on s’est débarrassé « des approches rétrospectives » et des descriptions faites sur des sujets longuement psychiatrisés, se résume en deux registres à valeur universelle ; centralité ou concernement et indifférenciation subjective.

Entrée dans la schizophrénie et réducteurs de complexité.

Un réducteur de complexité est une stratégie logico-motivationnelle approximative dont le but est d’assurer à moindre frais la viabilité du système (individu, équipe, institution) qui la développe. Il permet de fonctionner de façon suffisamment viable, à partir de la prise en compte d’un nombre très réduit d’items et sur des modes redondants de type schémas mentaux ou habitudes de pensées (Gaillard 2003a). Tous les humains en usent constamment, palliant ainsi à leurs limites logico-gognitives face à la complexité des univers dans lesquels ils se meuvent.

La centralité et l’indifférenciation subjective sont typiquement de puissants réducteurs de complexité en ce qu’ils permettent d’organiser le monde à partir d’une seule posture : « moi ».

Centralité : de fait, se poster au centre de tout événement quel qu’il soit et interpréter tout comportement de qui que ce soit comme s’adressant à soi, constitue un puissant réducteur de complexité, un extraordinaire simplificateur de monde. La posture centrale constitue une réponse a priori à tous les problèmes de logiques communicationnelles, elle résout a priori tous les problèmes d’interprétation de comportements des uns et des autres : quoi qu’ils fassent, ils le font à l’attention du sujet.

Indifférenciation subjective : là encore, cette posture définissant l’un et l’autre à la même place, qui plus est indéterminée, constitue une puissante réponse a priori concernant la question de la définition de la relation (Haley op.cit.) : dans un espace où, précisément, il a toujours été question de ne jamais se situer, que moi et l’autre puissent indifféremment occuper la même place y-compris dans un même corps et un même esprit, résout a priori touts les problèmes de définition de la relation.

Quelle psychothérapie ?

Concernant la thérapie de la schizophrénie que nous tentons de formaliser à partir des présents travaux, la technique de thérapie avec la famille que nous construisons ne tourne pas le dos à celle qui fait notre succès dans d’autres troubles (anorexie mentale, suites de deuil, phobies scolaires, troubles psychosomatiques, etc.) : elle comprend simplement un nombre indéterminé de séances, là où nous avions à cœur de toujours conclure en dix séances ; pour le reste, nous avons seulement peaufiné nos stratégies, toutes parfaitement argumentables tant sur le plan technique que sur le plan théorique, même si les praticiens non formés à la thérapie systémique peuvent les juger farfelues ou inconvenantes (de la même façon que des praticiens non formés à la psychanalyse trouveraient  farfelue ou inconvenante l’injonction de s’étendre sur un divan et dire « tout ce qui passe par la tête sans se censurer ») :

  • profil aussi bas que possible (pour éviter que les familles ne nous lancent le défi classique des familles à transactions schizophréniques : « voyons qui de nous est le plus fort !»),
  • disqualification de toutes les théories sur la schizophrénie (pour éviter le défi non moins classique : « quelles bonnes raisons pouvez-vous avancer pour soutenir que votre théorie est meilleure que la nôtre ?»),
  • disqualification renforcée par l’affirmation selon laquelle nous n’allons bien entendu pas faire une thérapie,
  • désignation du porteur de symptômes : c’est bien lui le malade, c’est bien lui qui dysfonctionne et non pas vous, famille ! …de façon que la famille accepte la première proposition de travail, laquelle consistera à modifier progressivement la tonalité émotionnelle (EE) constamment élevée dans les interactions, sachant qu’elle est le support neural et mental de perpétuation et de renforcement de la structure communicationnelle schizophrénique, sachant aussi que le nécessaire travail sur les CD n’est possible qu’à partir d’un taux de EE suffisamment bas.

Il semble que l’accomplissement de ce premier pas coïncide souvent avec un mieux-être global dans la famille (non encore mesuré par nous), assez perceptible par l’ensemble des guerriers fatigués pour leur donner envie de se reposer un peu : une rechute est évités. Tout l’art des thérapeutes est alors de tenir dans la durée, faute de quoi il ne nous semble guère possible d’atteindre de façon significative les rituels CD, c'est-à-dire le style communicationnel familial.

Le travail avec les parents seuls en termes de collaboration aussi étroite que possible (affiliation renforcée), l’élaboration en commun de petites tâches précises tournées vers une modification de l’expression émotionnelle dans l’interaction, ainsi que vers une modification des modalités logiques des interactions, l’émulation qui en découle, rend le travail convivial et agréable. Nous n’hésitons pas à faire varier le nombre des membres de la famille au cours du travail, selon que l’un ou l’autre se présente à certains moments comme une ressource pour tel ou tel changement dans les rituels familiaux.

il nous semble que travailler avec plusieurs familles rassemblées dans un même groupe faciliterait souvent les choses ; nous comptons mettre à l’épreuve ce mode de travail dès que possible.

Plusieurs équipes de par le monde ( Rund et coll. 1995) (Bridgman 1987), (De nayer 2001-Linares 2001-Miermont 2001) (Lumia 2001-Miermont 2002) pratiquent des formes voisines de thérapie (sur un mode stratégique ou sur un mode naïf) depuis quelques années et sont en mesure de fournir des chiffres quant à leur efficacité, chiffres réellement prometteurs puisqu’ils vont jusqu’à un abaissement de 70% du taux de rechutes en un an et 35% sur deux ans. Nous ne sommes donc plus tout à fait dans une phase de tâtonnement aveugle, mais plutôt dans une phase d’affinage et de validation des techniques. L’actuelle diversité des modèles psychothérapeutiques mis en œuvre, associée à une unicité suffisante dans la description des processus schizophrénigènes comme structures émergentes dans l’interaction familiale, sociale et culturelle, nous semble constituer un gage de créativité et d’efficacité.

Conclusion.

L’hypothèse que nous avons ici proposée concernant des apprentissage mentaux si particuliers qu’ils produiraient des couplages invasifs contrariant efficacement la mise en cohérence des trois mondes produits par trois organisations composantes essentielles des substrats neurobiologiques de l’esprit humain (cognitionnelle, émotionnelle et motivationnelle), hypothèse forte en ce qu’elle est étayée par une observation récurrente associée à une expérimentation probante, semble trouver un début de confirmation thérapeutique dans le succès aujourd’hui évalué de ces diverses formes de thérapies et d’accompagnements de modes systémiques et comportementalo-systémiques proposés aux familles dont un membre présente des comportements schizophréniques. Ces thérapies et accompagnements consistent en la production d’une alliance collaborative aussi puissante que possible entre famille et thérapeutes, suivie d’un remaniement très consistant des apprentissages émotionnels, cognitifs et motivationnels en matière de communication intra-familiale et sociale, étalé sur au moins trois années et souvent beaucoup plus.

 

Référence bibliographiques

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 NOTES :

[1] Maître de conférences HDR en psychologie pathologique, Université de Savoie. Thérapeute systémicien de la famille et du couple.

[2] Les praticiens et les chercheurs ont montré d’importantes difficultés à admettre que cela soit le cas pour l’autisme ; nous serons peut-être contraints un jour de l’admettre pour la schizophrénie ?

[3] qui a une évidence de droit et non seulement de fait.

[4] « Chacun des systèmes reçoit des imputs du monde extérieur. Dans ce modèle de cerveau, les systèmes ne communiquent pas directement les uns avec les autres. Mais, parce qu’ils reçoivent les mêmes imputs, ils sont amenés à connaître exactement les mêmes choses sur le monde. » LeDoux op.cit p. 308 (trad. Perso.).

[5] On peut évidemment parler d’équipement cognitif pour une cellule, autant que pour un éléphant…

[6] Rappelons que seul un certain nombre des candidats à la schizophrénie sont nés prématurés et que beaucoup de prématurés ne souffrent pas de troubles logiques.

[7] Le lecteur aura du même coup remarqué que l’explication d’un trait d’humour le détruit instantanément !

[8] « Each system receives imputs from the outside world. In this model brain, the systems do not communicate directly with one another. But because they have the same imputs, they come to know exactly the same things about the world. » LeDoux op.cit p. 308.

[9] On peut évidemment parler d’équipement cognitif pour une cellule, autant que pour un éléphant…

[10] Le modèle est le même, concernant les troubles psychosomatiques mais, cette fois, entre organisations physiologiques et contextes microsociaux.

[11] Le lecteur aura du même coup remarqué que l’explication d’un trait d’humour le détruit instantanément !

[12] pour plus de détail sur ces travaux, voir le superbe article de Stephan Hendrick (2002) : Familles de schizophrènes et perturbations de la communication : la communication déviante, le point de la recherche et son apport à la théorie familiale systémique. In Thérapie familiale 2002 vol. 23 n° 4.

 

 

 

Sites de recherche et réflexion systémique à consulter régulièrement :

MCX-APC

Le réseau « Intelligence de la Complexité » est soutenu et organisé par deux associations-sœurs : l’Association Européenne pour la Modélisation de la Complexité (MCX) et l’Association pour la Pensée Complexe (APC), toutes deux présidées par deux complices de toujours : le Pr. Jean-Louis LE MOIGNE pour la première et le Pr. Edgar MORIN pour la seconde, deux références mondialement incontestées dans les registres de la pensée complexe.
Le site web MCX est une véritable mine d’or en matière de références bibliographiques. En outre, MCX-APC organise chaque année un Grand Débat réunissant les chercheurs les plus innovants en la matière : vous disposez dans ce site d’un échantillon vidéo de ces Grands Débats (MCX GRAND DEBAT 2006).

IDRES

L’IDRES, créé et animé par Jacques BEAUJEAN, est un site dédié aux praticiens de la systémique, thérapeutes, mais aussi tous les travailleurs sociaux concernés par cette approche. Sa particularité et son extrême richesse tient à ce qu’il offre une énorme quantité d’articles in extenso et qu’il est un site wiki totalement interactif. A visiter régulièrement, donc. L’IDRES, basée à Liège (Belgique), est aussi un institut de formation à l’adresse de qui souhaite acquérir une formation complète de thérapeute systémicien.

SICS

La Société Internationale des Conseillers de Synthèse, crée et animée par Armand BRAUN, offre un site de prospective et de réflexion économico-sociétale de grande valeur. Le site SICS dispose d’une riche bibliothèque, à consulter régulièrement.

 

Projet d'établissement 2002 du CNRS français :

"S'attacher à la complexité (…) c'est reconnaître que la modélisation se construit comme un point de vue pris sur le réel, à partir duquel un travail de mise en ordre, partiel et Ccntinuellement remaniable, peut être mis en œuvre"